Le courage d'oser

Cher Raôul,

Depuis que la Société Saint-Jean-Baptiste a présenté ton projet d’hymne national créé en collaboration avec le compositeur Alain Sauvageau, le débat fait rage. Depuis deux jours, des critiques acerbes apparaissent dans les médias (surtout chez Power Corporation, en fait), et les citoyens qui voudraient saluer ton initiative et te défendre n’ont aucune tribune. Comme d’habitude. Mais quelle est la cible réelle de ces critiques? L’hymne que tu as proposé… vraiment?

À voir la pauvreté des arguments avancés par tes détracteurs, il est clair que ce que l’on vise, c’est le geste politique que constitue la présentation d’un hymne national pour le Québec. C’est l’idée de l’indépendance et de l’affirmation nationale du Québec que l’on cible avec méchanceté. Comme d’habitude. Depuis longtemps, toute initiative dans le sens de la libération du Québec est ridiculisée et démolie dans les médias fédéralistes. Il fallait s’y attendre. Ces gens-là sont en guerre. Ils tirent à vue sur tout ce qui sort du camp indépendantiste. Tu es presque seul au front présentement et tu en prends plein la gueule. Eh bien sache qu’il y en a d’autres avec toi. D’autres qui n’acceptent pas les crachats qu’on t’envoie au visage.

En fait, les critiques fédéralistes qui s’attaquent à toi, Raôul, me font penser à ceux qui s’attaquaient jadis à mon ami Pierre Falardeau lorsqu’il sortait ses films, particulièrement les plus virulents. L’entreprise médiatique de démolition complète se mettait en branle. Tout était nul dans ses films : le scénario, les acteurs, les costumes, les décors, la musique, l’éclairage, etc. Une honte pour l’humanité, semblait-il. C’est tout juste s’ils ne critiquaient pas le générique! S’attaquait-on vraiment aux films de Falardeau ou à ce que le cinéaste représentait, à l’idée d’indépendance du Québec qu’il portait? Poser la question, c’est y répondre. C’est tellement facile de se rabattre sur des supposés critères artistiques pour ruiner une œuvre politique. Nos ennemis ne vont pas se priver.

Ceci dit, ton hymne est-il un grand hymne? Ce que je sais, c’est que moi j’ai beaucoup aimé et que, lorsque tu l’as présenté en primeur, lors d’une assemblée à Québec du Mouvement Québec français il y a quelques jours, les 300 personnes dans la salle t’ont donné une grande ovation. Parmi elles, des écrivains, des chanteurs, des personnalités reconnus du milieu artistique québécois. Leur opinion doit valoir au moins autant que celle des scribouilleurs fédéralistes de Gesca.

Est-ce que ton hymne passera à l’histoire, sera-t-il retenu comme hymne national du Québec? Le peuple en décidera, as-tu affirmé toi-même. Si les journaux fédéralistes qui l’informent ne l’intoxiquent pas trop, ajouterais-je. Quoi qu’il en soit, j’espère que les critiques méchantes des journaleux de Desmarais ne vont pas trop t’atteindre, même si elles risquent de tuer dans l’œuf ton projet. Mais ce qui passera à l’histoire assurément, c’est toute ton œuvre et ton engagement pour la langue française, l’indépendance du Québec et la protection de nos ressources naturelles. Dans 100 ans, on continuera de lire et entonner tes poèmes et tes chansons, déjà enseignés de ton vivant dans de nombreuses universités de par le monde. Et me revient à l’esprit cette déclaration de Jules Falardeau lors des funérailles de son père : « Et vous, messieurs les journalistes, que va-t-il rester de vous après votre mort? Rien qu’un petit tas de cendres puantes. » Je ne saurais mieux dire.

Ce que je retiens aussi de ce projet d’hymne national, c’est que tu as décidé d’oser et d’aller au front alors qu’il aurait été bien plus facile de ne pas oser, de rester dans le confort et l’indifférence. On a dit que sur 62 artistes sollicités par la SSJB pour soumettre un projet d’hymne national, tu es le seul à avoir répondu à l’appel. Juste pour cela, tu mérites toute notre estime. Tu savais très bien que tu pouvais être critiqué durement, mais tu as tout de même décidé d’y aller. Seul. Avec courage. Et tu te retrouves maintenant seul devant la tempête. C’est admirable et si quelqu’un mérite une critique méchante, ce sont bien les 61 qui n’ont rien osé. Sans doute sont-ils occupés à préparer leur prochain album en anglais ou en « bilingue », dont personne ne se souviendra dans 10 ans.

Enfin, qu’on me comprenne bien, des gens et des journalistes ont le droit de ne pas aimer ton hymne. Ils peuvent même l’exprimer de manière ferme s’ils le veulent. Mais de quel droit des journalistes grassement payés par Power Corporation pour jouer leur rôle de chien-savant du statu quo peuvent-ils s’adresser à toi avec méchanceté et mépris et te manquer de respect à ce point? Comment un pauvre type comme Patrick Lagacé peut-il tenter de te ridiculiser alors qu’il est, lui, une caricature vivante de journaliste tout droit sorti du dernier Elvis Gratton?

Raôul, tu auras donc réussi à déranger nos ennemis fortement, et ils se sentent obligés de tenter de te démolir. C’est bon signe, en fin de compte. Chaque geste en faveur de la libération du Québec, chaque geste qui dérange nos ennemis est une avancée dans notre longue marche vers l’indépendance du Québec. Ne serait-ce que pour avoir osé un geste et parce que tu assumes dignement les coups qu’on te donne, merci infiniment Raôul Duguay. Quant à l’avenir de ton hymne, le peuple en décidera.

Pierre-Luc Bégin
Directeur
Éditions du Québécois

1 commentaire:

  1. Bien dit monsieur Bégin et j'espère tout comme vous que ça ne l'atteindra pas trop. C'est beaucoup de travail et c'est magnifique.

    De toute manière, c'est le geste qui compte. Quelque chose a été fait pour tenter de réveiller les consciences. Un pas de plus.

    Pas à pas nous vaincrons !

    Étant donné que les fédéralistes l'attaqueront dès qu'il en parlera publiquement(manière de le faire taire au fond,). Plusieurs utilisent le même argument pour détourner la conversation des vrais affaires, comme par exemple :'' un hymne ça se chante avant une partie de hockey, faut que ça soit plus entraînant, agressif ou çi ou ça.

    Alors,faudrait juste jouer un peu avec les mots.

    Il faudrait peut-être appeler cette oeuvre un chant patriotique ?

    Le chant patriotique '' L'hymne Ô Kébèk ''

    Un peu dans le sens de l'hymne à la joie.

    Ainsi, il pourrait sortir en parler sur toutes les tribunes et que voulez-vous qu'ils argumentent les fédéralistes ?

    Un chant patriotique est un chant patriotique !

    L'important est d'en parler et de faire connaître un peu notre histoire.

    Au plaisir,

    Jeanne du Lys

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